Harry Potter : la mer comme antagoniste majeur

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L’isolement

Le concept d’isolement pourrait sembler positif dans la mesure où il garantit la sécurité. N’est-ce pas d’ailleurs le cas de la mer encerclant la prison d’Azkaban ? En formant une sorte de barrière infranchissable, elle permet, en effet, d’isoler les criminels du reste des citoyens pour leur garantir une protection. Toutefois, l’aspect mis en avant par J.K. Rowling semble être l’opposé de la sécurité : la mer serait directement associée à la prison d’Azkaban formant une unité effrayante. Cela transparaît plus particulièrement dans les adaptations cinématographiques où le paysage représenté est sombre, la musique angoissante, la mer déchaînée et le ciel orageux. Cette analyse est renforcée par le fait que, tout au long de la saga, l’accent est mis sur la nécessité d’être entouré et de ne pas rester seul. Cette notion d’unité est mise en exergue par le directeur de Poudlard, Dumbledore, qui déclare notamment :

« l’union fera notre force, la division notre faiblesse ».

Toujours dans cette idée d’isolement, l’école est presque entourée d’eau. Au-delà de l’effet idyllique que cela confère au début – notamment lorsque les élèves de première année la traversent sur des barques à la lumière des lanternes – cet isolement confère un sentiment de sécurité. Sentiment de sécurité renforcé par le fait que l’école se situe sur une colline. Atteindre l’école semble donc être une tâche impossible pour qui n’y serait pas le bienvenu. Néanmoins, ces notions se voient bien vite balayées dès le premier tome lorsqu’un ogre parvient à rentrer dans l’enceinte de l’école – non sans l’aide d’une âme malveillante. Toujours est-il que l’efficacité de cette barrière formée par l’eau est remise en question. Elle l’est encore davantage si l’on considère les caractéristiques propres au monde des sorciers : ces derniers peuvent voler ou encore se téléporter. Dès lors on s’aperçoit que cette barrière de protection devient inutile et peut-être même dérisoire. Elle serait très utile dans le monde des moldus, mais dans le monde des sorciers inventé par J.K. Rowling, elle ne l’est pas.

Le danger

La mer ne serait donc pas une garantie de sécurité. Mais au-delà de ce constat, ne pourrions-nous pas dire que la mer est source de danger ? Comme un avertissement, l’autrice amorce cette dangerosité en dépeignant la mer comme un lieu effrayant, en l’associant aux anti-héros et ainsi en rendant la sécurité des élèves incertaine.

La représentation des sirènes dans la saga est sûrement l’élément le plus évident. Elles occupent une place importante dans le tome 5 de la saga, lors d’une épreuve du Tournoi des trois sorciers. En premier lieu, le danger des profondeurs marines – et de ce qu’elles regorgent – est mis en exergue par le contraste d’ambiance. En effet, hors de l’eau, le bruit est omniprésent puisque la fête bat son plein : l’engouement des spectateurs et la musique emplissent la scène. A contrario, une fois dans l’eau, tout devient étrangement calme. L’ambiance véhiculée n’est pas paisible mais bien anxiogène. Qu’est-ce qui se cache dans ces profondeurs ? Cette sensation d’angoisse diminue une fois la rencontre avec les sirènes passée. Ce sont des créatures laides mais elles ne semblent pas représenter un danger imminent : elles accueillent les nageurs sans les attaquer, par exemple. Le lecteur se sent donc apaisé. Toutefois, le climat angoissant réapparaît dès lors qu’Harry tente de sauver ses deux amies. Les sirènes commencent alors à attaquer et deviennent une réelle menace.

Ensuite, nous pouvons souligner la façon dont J.K. Rowling met en parallèle les horcruxes et l’eau. Pour rappel les horcruxes, notamment utilisés par Lord Voldemort, sont des objets remplis de magie noire qui permettent l’immortalité. Dans Harry Potter, les horcruxes représentent l’obstacle principal pour tuer Voldemort. Associer ces objets avec l’eau fait donc de cet élément naturel un réel antagoniste. Aussi, faire face aux horcruxes représente un réel danger, que cela concerne la recherche de l’objet ou sa destruction. Nous pouvons dès lors nous demander comment se matérialise le lien entre l’eau et les horcruxes. Le premier lien se crée lorsqu’Harry détruit le journal intime de Tom Jédusor avec une dent de basilic dans la chambre des secrets. En effet, si le journal en lui-même ne fait pas référence à l’eau, le lieu de sa destruction (les canalisations de l’école) et l’objet utilisé pour le faire (une dent de basilic, animal mythique aussi appelée « serpent des mers ») le relient à cet élément naturel. Une scène similaire se produit à nouveau lorsqu’Hermione détruit la coupe d’Helga Poufsouffle toujours dans le même lieu avec le même objet. Durant ces deux moments, l’eau se retourne contre les héros en faveur de leur ennemi. Par exemple, les cliquetis de l’eau réalisés lorsqu’Harry marche dévoilent sa position au basilic aveugle, l’eau s’élève en hauteur tel un avertissement alors qu’ils essaient de détruire l’horcruxe, etc. Enfin, nous pouvons mettre en avant la recherche de l’épée de Gryffondor par Harry, épée indispensable pour détruire les horcruxes. Ce passage met toute particulièrement en exergue l’alliance entre l’eau et le mal. Effectivement, alors qu’Harry plonge dans l’eau d’un lac gelé pour récupérer l’épée de Gryffondor, le médaillon maléfique qu’il porte à son cou l’étrangle, le faisant remonter à la surface. Toutefois, le lac étant gelé, Harry se voit coincé sous l’eau, étranglé par l’horcruxe. Sans l’aide de son ami Ron, Harry serait probablement mort. On voit dès lors à quel point l’eau joue un rôle important dans la mise en danger d’Harry, voire même dans les tentatives de le tuer.

La mort

Finalement, l’eau ne sera pas la cause de la mort d’Harry. Toutefois, elle sera présente dans les moments les plus tragiques de la saga : les morts de Dobby, un elfe de maison, et de Severus Rogue, professeur à Poudlard.

Dans un premier temps, nous pouvons souligner, une nouvelle fois, le rôle idyllique de la mer lors de la mort de Dobby. En effet, après une scène de combat, Dobby décède sur la plage dans un moment particulièrement émouvant. Si Harry semble désespéré, l’elfe de maison, quant à lui, semble accepter son sort. Cette acceptation met en avant une certaine fatalité qui ressort du calme de la scène. Effectivement, les vagues qui déferlent doucement sur la plage propagent une telle quiétude que l’idée que Dobby puisse s’en remettre semble alors irréaliste : toute volonté de combattre pour survivre est éradiquée par ce calme ambiant. Dans cette scène tragique, nous pourrions comparer la mer à un ange de la mort : le remous des vagues vient chercher l’âme du défunt pour l’emmener ailleurs. Finalement, derrière son aspect paisible, la mer reste bel et bien associée à la mort.

Dans un second temps, nous pouvons étudier la mort du professeur Rogue qui se déroule dans un décor tout autre, marqué par les ténèbres. Si dans les livres cette scène se déroule dans la cabane hurlante, les directeurs artistiques du film ont décidé de la tourner dans le hangar à bateaux. Derrière ce choix se cache la volonté de donner un tournant plus dramatique à la situation. Ainsi, Severus Rogue gît dans le hangar, à quelque pas d’un point d’eau. L’idée que la mort est directement liée à l’eau est renforcée par le fait que Rogue donne une de ses larmes à Harry. Cette larme est particulièrement cruciale pour le déroulement de l’histoire puisqu’elle est le moteur d’un retournement de situation majeur dans la trame narrative : Rogue, perçu comme une menace par Harry, devient alors un martyr.

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En conclusion, la mer dans l’univers de Harry Potter est intrinsèquement liée à l’isolement, le danger et la mort. Elle rappelle aux personnages, ainsi qu’aux lecteurs, que cet élément naturel peut être aussi impitoyable qu’inspirant. Cependant, la mer possède également une dualité qui mérite d’être explorée. En effet, elle peut incarner des valeurs positives telles que l’amitié et la joie. Dans ce sens, il serait intéressant de s’attarder sur des passages où la mer devient un lieu de partage, d’apaisement et de joie.

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